La prise de conscience de nos richesses nous oblige à les valoriser. Le patrimoine linguistique est là, il est vivant. Valoriser la langue guyanaise relève d’un défi non seulement culturel mais économique. C’est l’ambition que s’est fixée Loïs Pindard.

Pindjòkò est une entreprise de traduction créole. 

Comment cette idée a-t-elle germé ?

Loïs Pindard : J’ai toujours parlé créole. À 12 ans, j’ai remporté le concours de dictée créole. Au fil du temps, J’ai exploré la langue et j’ai été sollicité  pour des traductions, pour retrouver des termes, des expressions. Le créole était alors dévalorisé, dans un statut de patois ou de langue de la rue ! Le patrimoine linguistique est là. Il est vivant !

Lorsqu’on a commencé à l’écrire, le codifier, je me suis demandé pourquoi ne pas alors projeter la maîtrise de la langue dans une autre dimension, économique en l’occurrence ? Je me suis positionné sur la forme écrite la plus courante.

Maintenant que ce service existe, comment votre clientèle a-t-elle réagi ?

L’étonnement fut la première réaction. Certains me faisaient part d’un certain scepticisme sur la faisabilité… Tous ceux qui apprennent l’existence d’une offre de service de traduction créole sont intéressés.

Pensez-vous que le marché soit mûr ?

Il y a un vivier de professionnels, d’opérateurs migrants (gendarmes, enseignants, etc.), mais également d’associations qui sont demandeurs. Le créole n’est pas la langue des Créoles mais la langue de Guyane… Elle est parlée partout à travers le territoire (les Amérindiens Palikur de Favard qui ont perdu leur langue parlent créole). Alors oui, le besoin est là. Je l’ai vu notamment dans les secteurs économiques en plein développement et en besoin constant de main-d’œuvre, comme dans le BTP. Pindjòkò sera un réflexe.

Vous avez aussi une activité dans le développement durable sur un marché de niche. Qu’est-ce qui motive cet esprit d’entreprendre pour préserver nature et culture ?

Je dirais un mot : valorisation… Valorisation de notre richesse… Nous sommes riches. On ne le sait pas, on l’a oublié…. Mon activité dans le développement durable, c’est la valorisation des déchets, pour dynamiser des filières économiques locales. Cela concerne la nature qu’il faut préserver ,mais aussi la culture qui permet de fixer des règles de conduite, des manières de concevoir et vivre le monde. Qui sommes-nous en tant que Guyanais ? Je crois que cette question trouve sa réponse dans la nature. Une connexion avec la nature… Quand tu fais des djakas dans le Djokan, par exemple, tu imites les postures de la faune. La percussion, le tambour s’inspirent des ressources de cet environnement. Valoriser le créole ouvre des perspectives sur des débouchés économiques. À la base, je suis biologiste et, tout au long de mes études, j’ai eu une réelle sensibilité environnementale. Je me suis orienté vers le marketing ; je recherche la Valorisation. Ce n’est pas une question simple, car encore faut-il être conscient de sa richesse pour la valoriser. Au-delà de la traduction, Pindjòkò propose d’autres prestations intellectuelles en langues, en s’appuyant sur nos références culturelles. C’est la clef.